L’intégration de pratiques responsables devient un levier essentiel pour se démarquer dans les appels d’offres, alors que le secteur de la restauration collective est en pleine mutation. Les critères de RSE (responsabilité sociétale des entreprises) gagnent en importance, reflétant l’évolution des attentes des consommateurs et de toutes les organisations. Approvisionnement responsable, offre durable et engagement social : ces trois piliers redéfinissent les standards de l’industrie de la restauration collective en Europe. Ces aspects, même s’ils ne constituent pas le cœur des appels d’offres (le critère économique restant prédominant), sont de plus en plus pris en compte, que ce soit de manière explicite dans le cahier des charges ou comme éléments de différenciation face à la concurrence.
Approvisionnement responsable : un levier stratégique
S’approvisionner auprès de producteurs locaux et engagés est l’une des attentes fortes des consommateurs. Ainsi, une étude de l’ADEME souligne que 62 % des Français auraient changé leurs habitudes de consommation pour réduire leur empreinte environnementale. Au Canada, près de 38 % des consommateurs prennent souvent ou toujours en compte l’impact environnemental de leurs choix alimentaires. Quant aux États-Unis, 20 % des consommateurs choisissent de ne pas acheter de produits provenant d’entreprises alimentaires qui ne prennent pas de mesures pour réduire leur impact environnemental.
Dans ce contexte global, ce changement pousse notamment les acteurs de la restauration collective à diversifier leurs sources. Les œufs, que l’on retrouve dans de très nombreux plats et menus, bénéficient ainsi de critères comme une traçabilité renforcée et une réduction des distances parcourues par les matières premières, même dans des chaînes logistiques internationales.
Par ailleurs, intégrer des standards comme l’élevage en plein air ou la production biologique permet non seulement de garantir la qualité des produits, mais aussi de répondre aux exigences croissantes en matière de bien-être animal. Ces initiatives, bien que coûteuses, peuvent devenir des arguments différenciateurs dans un appel d’offres.
Offre durable et réduction du gaspillage
Avec 59 millions de tonnes de déchets alimentaires générés chaque année dans l’Union européenne, la lutte contre le gaspillage est une priorité. La restauration collective, au cœur de ces enjeux, peut adopter plusieurs mesures concrètes. Pour cela, l’optimisation des commandes grâce à des outils de prévision peut réduire les excédents tout en minimisant les pertes financières. Ces outils, basés sur l’analyse de données historiques et les tendances de consommation, permettent de prévoir précisément les quantités nécessaires en fonction des menus, des événements prévus, et des habitudes des convives. On peut aussi utiliser des logiciels intégrant des algorithmes d’intelligence artificielle qui ajustent automatiquement les commandes en fonction de la fréquentation prévue et des taux de consommation des différents plats. Une innovation qui limite les surplus alimentaires et réduit les coûts associés au stockage ou au gaspillage, comme on en trouve dans des outils comme Melba ou Inpulse.
En complément, la valorisation des biodéchets devient une solution incontournable pour donner une seconde vie aux restes alimentaires. De nombreux pays européens encouragent les établissements de restauration collective à investir dans des équipements comme les composteurs ou les unités de méthanisation. Ces dispositifs transforment les déchets organiques en biogaz, une énergie renouvelable pouvant alimenter des véhicules ou des réseaux de chauffage. Par exemple, en Suède, des cantines scolaires collaborent avec des centres de traitement locaux pour convertir leurs déchets alimentaires en biogaz, contribuant ainsi à réduire leur empreinte carbone.
Ces initiatives ne se limitent pas aux grandes infrastructures. Même les établissements de taille moyenne peuvent s’associer à des entreprises spécialisées dans la collecte et le traitement des biodéchets pour intégrer ces pratiques sans investir lourdement. En plus de réduire les coûts liés à l’élimination classique des déchets, ces démarches répondent aux attentes des clients et des collectivités locales en matière de durabilité.
Engagement social et optimisation logistique
L’engagement social est une composante clé pour ancrer les pratiques RSE dans la restauration collective. Former et responsabiliser les équipes sur l’importance des démarches durables est essentiel. Ces initiatives renforcent leur implication et leur motivation, tout en favorisant une meilleure mise en œuvre des pratiques responsables.
La transparence est également cruciale. Travailler avec des fournisseurs qui garantissent une chaîne d’approvisionnement éthique et traçable devient un critère important dans les appels d’offres. En France, la loi EGalim renforce les obligations d’information vis-à-vis des consommateurs dans les établissements de restauration collective. Elle impose l’affichage des informations sur l’origine et la qualité des produits utilisés dans les repas. Cela inclut l’affichage de la part de produits sous signes d’origine et de qualité, et de produits biologiques, permettant ainsi aux convives de prendre des décisions alimentaires informées.
En Belgique, Vegaplan est un système de certification qui garantit la qualité des produits végétaux et des services dans le secteur agricole. Vegaplan joue ainsi un rôle crucial dans l’assurance de la qualité de la production primaire belge et facilite l’accès aux marchés nationaux et internationaux pour les agriculteurs certifiés
Parmi les autres initiatives européennes, en Italie, l’organisation FoodInsider a mis en place une évaluation annuelle de la qualité et de la durabilité des menus proposés dans les cantines italiennes. Ce « Trip Advisor » de la restauration collective alimente un débat national sur la durabilité de l’alimentation et permet de comparer les différents modèles de restauration collective.
On peut aussi citer le cas de la Suède, où la ville de Södertälje travaille depuis plus de 10 ans sur la durabilité de sa restauration collective. Leurs efforts ont permis de réduire la consommation de viande de 30% et le gaspillage alimentaire de 40% dans les cantines
Enfin, l’optimisation logistique joue un rôle central. En centralisant les commandes ou en collaborant avec des partenaires pour mutualiser les livraisons, il est possible de réduire les coûts tout en diminuant les émissions de gaz à effet de serre. Cette stratégie est particulièrement utilisée dans les pays nordiques, où la logistique partagée entre différents établissements est devenue une norme.
S’engager dans des initiatives durables et sociétales est un pari gagnant pour les acteurs de la restauration collective. Ces démarches permettent non seulement de répondre aux attentes des consommateurs et aux exigences des appels d’offres, mais elles contribuent également à créer un impact positif sur l’environnement et les communautés locales. En intégrant progressivement ces pratiques, les entreprises répondant aux appels d’offre peuvent améliorer leur compétitivité tout en s’inscrivant dans une dynamique de responsabilité collective. La clé réside dans l’équilibre entre ambition et pragmatisme : investir dans un avenir durable, sans perdre de vue les réalités économiques.